Avis au graphiste

Leur connaissance aiguë de l’image place les graphistes à la fois dans des missions d’intérêt public et à la fois dans les frénésies et les turpitudes de la « société de la communication ».

Valeur d’usage

L’intérêt public qu’amène le savoir-faire graphique se trouve dans de petites choses, dans des détails, dans la lisibilité d’un formulaire ou d’un guide pratique, dans l’évidence d’une signalétique, dans la clarté d’une signature1… Il s’agit de signes et de compositions qui apportent du confort, du calme, tout cela dans une modestie de l’invisible. Ce n’est d’ailleurs qu’au moment où ces signes deviennent « visibles », maladroits ou carrément incompréhensibles, qu’on peut se rendre compte de leur importance.

Valeur d’expression

Peintres, caricaturistes, artistes d’avant-gardes, militants… et plus récemment graphistes, s’essayent depuis bien longtemps au travail de l’image, du signe, du code, des lettres et des couleurs afin de donner forme et puissance à leurs idées et idéaux.
À leur opposé, les pouvoirs ont depuis longtemps compris le rôle que joue « l’image » dans la maîtrise de territoires toujours plus éparses et de populations toujours plus « orgueilleuses ».
Qu’on veuille faire réagir, qu’on veuille manipuler ou contrôler, l’image a presque toujours été un outil adéquat et elle est de plus en plus prépondérante dans chacune de ces démarches.

Entre les deux mon savoir-faire balance

Pour participer pleinement à la vie sociale, ces deux valeurs doivent être réunies dans nos pratiques de graphistes. Maintenant il nous semble important de concentrer nos efforts, temporairement, le temps d’un mémoire, sur une seule de ces valeurs.
Si la valeur d’usage du graphisme est bien trop souvent délaissée, ce qui est hautement regrettable, la valeur d’expression est par contre sur-employée. Elle est l’omniprésent moteur de la publicité et de la propagande.
Mais nous pensons – douce utopie – qu’elle pourrait être tout autant un outil fabuleux à la démocratie, un déclencheur de parole publique, de réflexion intimes et collectives, un relais à la sensibilisation politique… Un « graphisme de la démocratie » doit sans aucun doute prendre place en ville.


1 Panneaux, formulaires, programmes, plans, fiches horaires, brochures, plaques de rue, plaques d’égouts, numéros d’immeubles, banderoles, devantures de locaux, papiers à lettre, enveloppes, pancartes provisoires, décorations de fêtes, badges, scénographies d’expositions, poubelles, véhicules utilitaires, rapports d’activités, bulletins municipaux, notes de services, avis municipaux, papiers d’identité, etc.